Les Othenin-Girard, d’origine suisse, formaient un petit cocon avec leur fils unique. Ils arrivent en France dans les années 20 et craquent sur une magnifique maison de maître, construite à la fin du XVIIIe siècle sur 160 hectares de terrain. Elle est située à Nouan-le-Fuzelier, en plein cœur de la Sologne. Ils achètent ce domaine à la famille Cartier-Bresson avec pour objectif d’y passer leur retraite. Nelly qui est ancienne médecin et Tell qui a travaillé dans la comptabilité jouissent d’une fortune confortable.

Ils passent du temps à chiner pour meubler la maison et commencent des travaux de rénovation pour faire de ce domaine auquel ils tiennent tant, un lieu de vie chaleureux qui leur ressemble.

Mais le rêve des Othenin-Girard se brise net lorsqu’une nuit, le 9 juin 1974, un coup de téléphone annonce une nouvelle tragique : leur fils unique Philippe vient de se tuer dans un accident mortel en voiture à tout juste 30 ans.

Le couple est bouleversé. Ils viennent de perdre leur seul enfant et leur unique héritier. Cette nuit-là, le père Boitard, curé de Nouan-le-Fuzelier, resté près des parents effondrés, aurait conseillé « Ce n’est pas aux riches qu’il faut donner, mais aux pauvres » au père de famille inquiet pour l’avenir de sa propriété.

Après mûre réflexion et guidé par les conseils du curé, le couple décide, en avril 1977, de faire une donation de leur domaine de Mont-Evray aux Petits Frères des Pauvres afin que la mémoire de leur fils survive. Ils précisent qu’ils souhaitent que ce lieu soit destiné un jour aux personnes âgées et à l’accueil de leur entourage.

Tell s’éteint le 17 septembre 1981 tandis que sa femme décède le 26 janvier 1990.

Le CRG, un lieu conforme aux souhaits du couple

Conformément à leurs engagements auprès du couple, les Petits Frères des Pauvres construisent en 1993 le Centre de Rencontre des Générations de Mont-Evray. C’est un lieu de vie qui accueille simultanément une soixantaine de personnes âgées en hébergement permanent ou temporaire, des jeunes en classes de découverte ou en vacances, des stagiaires en formation, des familles, des gens de passage au sein de l’hôtellerie associative…

Par ailleurs, une Fondation au nom de leur fils a été érigée en 1994. La Fondation Philippe Othenin-Girard préserve et valorise le domaine de Mont-Evray.

« Depuis notre première rencontre en mai 1977, j’ai pu échanger maintes fois avec Madame et Monsieur Othenin-Girard, jusqu’au décès de chacun d’eux et j’ai pu mesurer leur profond attachement à ce domaine. Je pense qu’ils seraient fiers de voir, aujourd’hui, avec quel soin et quel enthousiasme leur domaine est géré et entretenu. », explique Gabriel Bertrand, Président de la Fondation Philippe Othenin-Girard.

Centre de Rencontre des Générations
Le CRG, lieu de vie des Petits Frères des Pauvres.

Vous connaissez l’entraînant générique de Médiavision diffusé dans les salles de cinéma (Publicité de Jean Mineur) ou les musiques de « La Cage aux rossignols » de Jean Dréville en 1945 ou encore celles d’« Occupe-toi d’Amélie » en 1949. C’est à René Cloërec qu’on en doit la composition.

Le jeune René fait ses études à l’Ecole supérieure de musique de Paris d’où il ressort avec le premier prix de piano en 1928. Il fait ses gammes en tant que pianiste puis chef d’orchestre de music-hall.

Mais très vite, la passion du cinéma l’emporte… Au début des années 40, le cinéaste Claude Autant-Lara lui propose de composer les musiques de son film « Douce ». Les deux compères vont alors former un duo inséparable et le compositeur signe les musiques de tous ses prochains films : « Sylvie et le fantôme » en 1946, « Occupe-toi d’Amélie » en 1949 jusqu’au « Meurtrier » en 1963.

René Cloërec travaille aussi avec d’autres réalisateurs comme René Clément pour « Le père tranquille » (1946), Jean Delannoy pour « Dieu a besoin des hommes » (1950) et Jean Dréville avec « La Cage aux rossignols ».

Enfin il côtoie de près Edith Piaf pour qui il signe : « Paris-Méditerranée », « C’est toi le plus fort », et « Le grand voyage du pauvre nègre ».

Il se retire du cinéma en 1965 pour se consacrer notamment à la scénographie des châteaux de la Loire. Il vit alors des jours heureux aux côtés de son épouse Augustine, avec qui ils n’ont pas d’enfants.

La Fondation Bersabée, légataire universelle

Le couple Cloërec, n’ayant pas d’héritiers, se préoccupe de sa transmission. Prévenants, ils rédigent dès 1964, une donation entre époux pour le dernier survivant. Plus tard, en 1986, ils établissent ensemble un testament qui nomme comme légataires universels plusieurs associations qui leur sont chères dont la Fondation Bersabée – Fondation des Petits Frères des Pauvres.

René Cloërec décède à 84 ans le 13 décembre 1995 et est inhumé au cimetière communal de Vaucresson (92). Quant à Augustine Cloërec, elle s’éteint le 23 septembre 1996 à l’âge de 89 ans faisant alors hériter la Fondation Bersabée de 25 % des droits d’auteur de René Cloërec. Ainsi, la Fondation Bersabée perçoit une rémunération pour l’exploitation de sa musique et doit donner son accord pour la reproduction et la représentation de celle-ci.

Grâce à un legs comme celui-ci, la Fondation Bersabée, créée en 1977 par l’Association les Petits Frères des Pauvres, peut offrir un toit à ceux qui n’en n’ont pas. Ainsi, elle met à disposition des logements individuels ou regroupés en petites unités de vie ou en résidences sociales pour des personnes âgées ou en situation de grande précarité qui sont accompagnées par notre Association ou d’autres organismes.

Rendre un peu de ce qu’il avait reçu. Ce qui a mené Jean-Pierre René Degavre aux Petits Frères des Pauvres était peut-être écrit dans sa plus tendre enfance. Né sous X à Brive-la-Gaillarde (19) en 1943, il est heureusement adopté 2 ans plus tard par un couple de parisiens. « Si mes parents ne m’avaient pas sorti de là, je serais allé travailler dans une ferme, et j’aurais vécu un enfer car « la terre est trop basse pour moi » sourit-il.

Dès 18 ans, il démarre sa vie professionnelle chez Prisunic (racheté ensuite par Monoprix) en tant que vendeur et grimpe petit à petit les échelons jusqu’à devenir directeur de magasin à 30 ans.

Arrivé à l’âge de la retraite et toujours célibataire, il est frappé par la misère autour de lui« J’ai vraiment pris conscience qu’il y avait beaucoup de misère autour de nous, peut-être parce que je me suis beaucoup plus promené dans les rues qu’avant », observe-t-il. Juste en bas de chez lui, il constate que devant les locaux d’une association caritative, de nombreuses personnes font la queue mais parmi elles, aucune personne âgée ! Pour lui, c’est la révélation : « Quitte à aider quelqu’un, autant aider des gens qui ne peuvent pas venir jusqu’aux associations ».

Un vrai engagement pour les Petits Frères des Pauvres

Jean-Pierre Degavre commence alors par faire des dons d’argent aux Petits Frères des Pauvres puis à donner chaque année des meubles et des tableaux qui sont revendus lors de nos grandes ventes solidaires.

En mai 2012, il décide de léguer son appartement. Il explique : « J’ai eu le regret de constater qu’en vieillissant les seniors sont souvent abandonnés par leur famille. C’est pourquoi j’ai finalement décidé de désigner l’association des Petits Frères des Pauvres légataire universelle. J’avais plusieurs fois eu l’occasion de lui donner des choses auxquelles je tenais, et je ne l’ai jamais regretté ».

Durant 13 ans, il noue une vraie relation avec notre pôle Relations Testateurs dont les membres deviennent aussi peu à peu des confidents.

Au terme d’une longue maladie, il s’éteint le 6 janvier 2019. Les Petits Frères des Pauvres ont veillé à ses dernières volontés funéraires et ont coorganisé une messe avec ses plus proches en célébrant son humour, sa sensibilité et sa générosité.

 J’ai décidé de désigner l’association des Petits Frères des Pauvres légataire universelle. J’avais plusieurs fois eu l’occasion de lui donner des choses auxquelles je tenais, et je ne l’ai jamais regretté.

Jean-Pierre Degavre, donateur

Polytechnicien, ingénieur du corps des Poudres, fondateur de la Société Rhodiacéta puis directeur général des Usines Rhône-Poulenc. Une carrière prestigieuse, c’est ce que vous avez peut-être retenu de Marcel Bô. 

Pourtant ceux qui l’ont connu disaient de lui qu’il était bien sûr un « grand patron », mais surtout un « chef humain et bienveillant ». S’il devient vite un homme d’affaires occupé et très demandé, Marcel Bô n’en n’oublie pour autant pas ses valeurs humaines

Il se préoccupe des autres, plus particulièrement du sort des plus âgés. « Il s’intéressa continuellement au sort des ingénieurs âgés en faisant partie du Conseil de la Société de Secours aux Ingénieurs Chimistes », note alors dans une lettre H. Jacquillat, Vice-Président de l’Association E.P.C.I.

Mais surtout, Marcel Bô va faire la connaissance des Petits Frères des Pauvres…

Alors que plusieurs habitations sont à vendre au sein de la commune de Jully-lès-Buxy (71), qu’il connait bien, le philanthrope décide d’acheter au début des années 1950, le château de la commune. Cette magnifique demeure construite au 18e siècle, entourée de vignes, est la propriété de la famille Cornudet depuis le 19e siècle. 

Jully : le 7e château du Bonheur

Château de Jully
Le château de Jully, maison de vacances des Petits Frères des Pauvres.

Mais moins de 10 ans plus tard, pensant à ceux qui n’ont pas la chance d’être dans sa situation, Marcel Bô appelle les Petits Frères des Pauvres pour leur demander s’ils n’auraient pas besoin d’un château… Il sait qu’une vaste demeure pourrait être d’une grande utilité à notre Association.

À cette époque, les Petits Frères des Pauvres commençaient déjà à organiser des séjours vacances, notamment au sein du château de Montguichet. Cette proposition tombe à pic !

En 1960, Marcel Bô décide donc d’en faire
la donation à notre Association. Après Montguichet, Achy, La Prée, Villerville (maison détruite en 1962 à la suite d’un affaissement de terrain), Gigny, Le Saumont (revendue récemment), la maison de Jully a été le 7e château du bonheur des Petits Frères des Pauvres

Elle permet d’accueillir des personnes âgées en vacances et pour un hébergement temporaire (en cas de situation de fragilité passagère). « On va de surprise en surprise avec les Petits Frères des Pauvres. L’année dernière, quand je suis parti en séjour à Jully, je vivais encore en hôtel social, j’avais les douches et les toilettes à l’étage. Lorsque je suis arrivé à Jully, je me suis dit « Mon Dieu, c’est un 5 étoiles pour moi ! C’est le grand rêve ! ». Moi qui ne mangeais que des plats réchauffés, on nous a servi au premier repas un bœuf bourguignon, alors là… c’était le bonheur ! », précise Jean-Marc, 58 ans, suivi par l’équipe d’accompagnement au logement de Paris Simplon (18e) et en vacances au Château de Jully.

Quant à Marcel Bô, il décède à 76 ans le 13 août 1968 à son domicile parisien et repose à Jully-lès-Buxy où il est inhumé

Lorsque je suis arrivé à Jully, je me suis dit « Mon Dieu, c’est un 5 étoiles pour moi ! C’est le grand rêve ! »

Jean-Marc, personne âgée accompagnée.